La ciste voyageuse #25

Cachée le 07 janvier 2008 par Gégé80
Découverte le 12 janvier 2008 par Barfla

L'énigme

En me promenant avec la Voyageuse, je fis la rencontre de cet étrange personnage portant fièrement sa rosette sur son vêtement de cuir.
Il n'était pas d'ici et me conta l'histoire de ce gentilhomme qui tenta vainement d'introduire en cet endroit au climat peu propice cette culture que, lui, avait bien connue.
Je le suivis quelque temps le long de l'eau et nous sommes arrivés devant la grande qui, si on en croit la légende, avait fait un tour sur elle-même en cette nuit de Noël.
Nous nous sommes séparés en abandonnant la voyageuse dans les branches de l'arbre tout proche.



La solution de Gégé80

J'avais été intrigué par un article que j'avais lu relatant une expérience menée en Picardie pour la culture du mûrier blanc fournissant l'alimentation du ver à soie. Le sieur d'Estouilly de Ham investit dans cette culture qui, finalement s'avéra décevante, le terrain et la température n'étant pas favorables à celle-ci.
D'où l'étrange personnage portant fièrement sa rosette sur son vêtement de cuir.
La rosette faisait allusion à la charcuterie typique de Lyon.

Le vêtement de cuir au tablier de sapeur , spécialité tripière des bouchons lyonnais.

La culture dont on fait allusion est celle du mûrier blanc, alimentation des vers à soie.



La production de la soie et sa transformation ayant été longtemps une activité des canuts lyonnais

Cette anecdote n'étant pas évidente à trouver sur Internet.
On pourra trouver des éléments ici :

Archives

Et aussi dans l'almanach 2008 du picard.

La première cité était donc Ham (Estouilly étant rattaché à Ham depuis 1965)
Mais il me fallait trouver une autre porte d'entrée pour la voyageuse
Le long de l'eau faisait bien sur allusion à la Somme.
En cherchant à partir de Ham, le long de la Somme , on arrivait à la commune d'Eppeville.
Dans les marais, se trouve une pierre appelée La Pierre qui Pousse


Eppeville - Somme
La « pierre-qui-pousse » est un rocher haut de 1.90 m dont on dit qu’elle pousse des gémissements toutes les nuits. On dit aussi qu’elle grandit régulièrement et qu’elle tourne sur elle-même durant la nuit de Noël.




Une fois trouvé ce dont il s'agit, reste à y aller.
J'avoue que j'avais pensé à cette énigme avant Noël.
Mais quand j'ai voulu la cacher, il y avait du brouillard et comme j'allais à l'aventure je me suis alors rabattu sur Fieffes.
Geoportail ou GoogleEarth m'ont été utiles pour essayer de localiser avec précision l'endroit où était érigée la Pierre.




Encore bravo à Barfla qui n'a pas eu besoin d'aide pour trouver le lieu prècis et qui n'a pas eu peur de faire un peu de marche !!


Le récit de Barfla:

Cela a été simple et compliqué.

Simple:
car dès la réception de l’énigme et une petite heure de recherche sur internet, j’avais découvert La-pierre-qui-pousse à Eppeville (grâce à la jolie légende de Noël).
Poursuivant dans cette voie, j’avais découvert qu’il y avait plusieurs menhirs autour de la grande Pierre.

Compliqué:
car le reste de l’énigme résistait :

j’ai d’abord pensé à Parmentier (mais il n’était pas gentilhomme) et la pomme de terre s’est plutôt bien acclimatée par chez nous ;
ensuite j’ai pensé à la canne à sucre (vu la sucrerie d’Eppeville) et là je me suis retrouvé sur la piste d’Olivier de Serres, gentilhomme (mais pas du XVIIIème) et de Benjamin Delessert qui a été décoré de la Légion d’honneur par Napoléon
(Tilt ! Là voilà ma rosette, me dis-je précipitamment).

Jules Paul Benjamin Delessert,
né à Lyon le 14 février 1773 et mort à Paris le 1er mars 1847, est un homme d'affaires et naturaliste français.


Il est rappelé en 1795 par son père qui lui confie ses biens et la direction de la maison de banque.
Il fonde en 1801 une raffinerie de sucre à Passy où il introduit des procédés nouveaux,
puis bientôt une vingtaine d’autres établissements du même genre dans différentes régions françaises.
Lors du blocus de la France, c’est Delessert qui, en se basant sur les recherches du chimiste allemand Franz Karl Achard (1753-1821), met au point la méthode d’extraction du sucre à partir de la betterave, méthode qu’il nomme Bonmatin.
En récompense des services rendus, Napoléon le fait chevalier de la Légion d'honneur. En 1812, il accède au titre de baron d’Empire.

Olivier de Serres (1539-1619)
est un autodidacte français qui fut l’un des premiers à étudier de manière scientifique les techniques agricoles et à en rechercher l’amélioration de manière expérimentale.

De ce point de vue, on peut le considérer comme le père de l’agronomie.



Né à Villeneuve-de-Berg dans le Vivarais (aujourd’hui département de l’Ardèche),
Olivier de Serres est issu d’une famille protestante aisée, ayant fait fortune dans le commerce du drap.
La position de sa famille permet à Olivier de bénéficier des meilleurs enseignements et d’un précepteur privé.
Il complète sa formation par de nombreux voyages en France, Italie, Allemagne et Suisse.
Très tôt, il fait preuve d’une curiosité intellectuelle proche de celle des humanistes de la Renaissance.

À 19 ans, il acquiert le domaine du Pradel, dont il fait une ferme modèle qui sera le théâtre de nombreuses expérimentations pratiques.
Son but est de faire partager son savoir, tant aux paysans pour leur permettre d’obtenir de meilleures récoltes, qu’aux propriétaires pour faire fructifier leurs domaines.
On lui doit l’introduction de nombreuses autres plantes, telles que la garance, le houblon et le maïs.
Il fut le premier à travailler à l’extraction du sucre à partir de la betterave, mais sans arriver à un processus rentable.

Mais Gégé80 est venu ruiner tous mes espoirs en cassant la piste sucrière !
Et voilà qu’il balançait un mûrier blanc, nourriture des vers à soie comme indice !

Nouvelles recherches sur le mûrier blanc, sa culture en Picardie, le ver à soie, son exploitation par ici.
Résultat : Néant. (Je n’ai pas dû chercher assez, puisque on pouvait trouver quelque chose concernant cette culture près de Cagny. Bravo Sibiville !)

J’ai bien recroisé à l’occasion la route d’olivier de Serres mais pas en Picardie :

( WIKIPEDIA)
C’est grâce à Olivier de Serres que la production de la soie fut introduite en France, via le développement de plantations de mûriers dont les vers à soie se nourrissent.
Ainsi, 20 000 pieds de mûriers seront plantés aux Tuileries et 10 000 à Saint-Germain-en-Laye. Avec François de Traucat, jardinier de Nîmes, il développe intensément le mûrier dans le midi de la France. Quatre millions de plants sont cultivés en Provence et Languedoc. En 1602, une ordonnance royale impose à chaque paroisse de posséder une pépinière de mûriers et une magnanerie.

Le reste des indices n’a fait que me rendre de plus en plus perplexe :
une rosette, un menu, un tablier de sapeur ?
Il ne manquait qu’un raton laveur !

Un peu las de tourner en rond tel un ver à soie dans son cocon, je suis parti faire une ultime vérification sur internet :
Oui, le menhir d’Eppeville est bien le seul dans la Somme à être concerné par la légende de Noël, et Gégé80 m’avait bien confirmé qu’il n’était pas le seul, qu’il avait des « petites sœurs ».
J’appris aussi qu’il se trouvait « non loin du canal de la Somme, dans une prairie, entre Eppeville et Sancourt-Viefville ».
Bien entendu, rien sur la carte IGN !

Comme j’avais un peu de temps disponible samedi matin, et qu’il faisait beau, je me suis dit : Pierre-qui-pousse, à nous deux !

Arrivé à Viefville, j’ai longé de loin le canal, d’un sens puis de l’autre :
Aucune indication nulle part. Seule solution, les autochtones.

Après avoir dérangé une charmante demoiselle allongée dans son canapé à regarder la télévision (non sans avoir été fêté comme il se doit par ses deux chiens aux pattes bien boueuses),
j’appris que j’étais bien à proximité de la fameuse pierre mais qu’il ne fallait pas trop compter la voir car c’était assez loin et qu’elle devait être cachée par des roseaux.
Elle m’indiqua quand même la direction à suivre : une maison aux volets verts un peu plus loin.

Arrivé à cette maison, je jette un coup d’œil vers le canal et suis interpellé par le retraité qui habite en ces lieux.
Je lui explique l’objet de ma quête et là :

- Les menhirs ? Oh, c’est compliqué pour y aller et puis vous verrez rien,
ils sont envahis par les roseaux, et puis il faut des bottes,
vous pouvez pas y aller comme ça !
- Bah, tant pis, je me changerai après…
- Et puis, vous savez, il y en qu’un de grand,
les autres ils dépassent à peine de terre ;
ils ont été récupérés à la décharge à Offoy et le maire,
il les a alignés comme ça…
- Et la légende ?
- Oh ! des légendes, il y en a partout.
Nous, on ne l’a jamais entendue pousser des cris !

Après quelques minutes de discussion du même tonneau, devant mon insistance, il m’indiqua le parcours à suivre :

- Vous voyez les arbres avec des boules là-bas ?
Eh bien, vous longez le champ jusque là et puis vous allez à droite dans le bois,
vous trouverez deux ponts sur le canal ;
de l’autre côté, il faudra suivre le canal sur trois-quatre cents mètres ;
vous verrez une pierre dans le chemin, ça sera à droite dans une clairière ;
mais avec les roseaux vous ne verrez rien.
Ah, si il y a le grand arbre foudroyé, lui vous le verrez du chemin…

Un grand merci et me voilà parti.

Ses indications étaient en fait très précises :

Le canal


la pierre le long du canal


la clairière


Et la pierre, tout à fait accessible, plus en tout cas que la ciste :

Gégé80 l’avait bien dissimulée sous un subtil arrangement d’écorce ! Heureusement qu’il y avait la photo sur le blog !
J’ai fait plusieurs fois le tour de l’arbre avant de deviner la cachette : ce qui m’a trompé,
c’est aussi l’indication qui figure dans l’énigme :« dans les branches de l’arbre », la ciste se trouvait le long du tronc.


Et fève dans la galette :


le Solitaire était doublement gagnant : 4 euros.

Je ne connaissais pas ce site assez sauvage, je crois que je n’y serais jamais allé sans cette ciste (puisqu’il ne figure dans aucun circuit touristique)
mais il vaut le déplacement, surtout en hiver quand ça canarde tout autour, on se sent un peu gibier, cela donne du piquant à la quête !
On s’attend à voir la Pierre pousser des hurlements sauvages, à se lever pour agripper une liane et se déplacer d’arbre en arbre…

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